par Caroline Bass, vice-présidente du Réseau Abibac, professeur d’histoire-géographie au lycée Gustave Monod d’Enghien
Pourquoi s’interroger sur le pouvoir et la puissance de l’image aujourd’hui dans un champ pédagogique interculturel ?
L’univers des élèves est un monde saturé d’images favorisé par le développement de nouveaux supports et technologies (réseaux, smartphones, tablettes, internet…) Ce déploiement d’images s’opère sur un mode aléatoire, non trié, ni hiérarchisé.
L’accès se fait à toutes les formes d’images sans filtre et aux effets multiples qui peuvent être délétères pour un public adolescent. Elle est aussi fascinante et nouveau support d’expression aux enjeux multiples, y compris pédagogiques.
Les élèves sont à la fois dans la réception et la création de l’image. Le besoin est grand d’une éducation double qui soit à la fois celle de la perception mais aussi celle de la diffusion des images.
Du point de vue pédagogique et en croisant les approches, on peut travailler sur l’analyse et l’utilisation qu’en font les Allemands et les Français mais aussi voir en quoi se complètent l’historien et le littéraire.
En examinant la démarche didactique en Allemagne, l’approche est plus « émotionnelle » et entend déclencher le questionnement du public adolescent avant de procéder à l’analyse plus scientifique de l’image. Il s’agit de susciter l’intérêt de l’élève pour qu’il développe lui-même une problématisation, qu’il comprenne par lui-même les enjeux de l’image. La méthode française est en cela un peu plus « cartésienne » et passe plus rapidement à une analyse plus formatée mais qui permet aussi plus rapidement le positionnement critique. Les deux méthodes sont nécessaires et complémentaires ; le besoin est à la fois de travailler sur le ressenti, les effets de l’image et d’y appliquer la distanciation pour mieux la comprendre et l’identifier : image de propagande manipulatoire ou information fiable et vérifiable, simplification voire schématisation ou introduction suscitant la volonté d’approfondissement ? Car l’enjeu est bien là, de savoir classer et filtrer tout en comprenant la puissance des effets d’une iconographie.
Par ailleurs, la question peut être aussi d’accompagner une créativité qui génère l’image, parfois au risque de la transgression qu’amplifient voire suggèrent les réseaux. L’élève peut devenir créateur d’image pour s’en approprier les codes.